ANARCHRISME !

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Consolider l’e-démocratie

La suppression proche du suffrage universel constituait le thème du jour. L’objectif était de consolider l’e-démocratie, dite aussi gouvernance positive mémorielle, en l’immunisant contre les lubies populaires. Il s’agissait en particulier de saper l’audience des formations extrêmopopulacières en restreignant le droit de vote aux seuls citoyens qui accepteraient de ne disposer que d’un clic univoque. C’est-à-dire d’un clic dont le choix exclusif serait approuvé par des collectifs postrépublicains homologués, tels les indéfatigables Lycéens trotteurs, les Anarchistes pour l’Etat ou les Amoureux transitoires du grand capital, tous représentants de la néo-bourgeoisie planétaire. Bref, l’élite de la société civile des grandes métropoles numériques entendait renvoyer le peuple en chair et en os à ses foyers.

Guy Hermet, Soyez démocrates ou je vous bombarde !, Catholica n°123.

Un entretien au Lys Noir

Cher Camarade, tu cites souvent cette phrase de Péguy « seule la tradition est révolutionnaire… », Penses-tu alors à rebours qu'une révolution, une vraie révolution de complot qui fonctionnerait enfin, devrait donc être fatalement "royale", en tout cas "traditionnelle" pour réussir ?

Révolution, à l'origine, signifie dans l'ordre politique une restauration : c'est ainsi qu'on l'entend au dix-septième siècle. Ce n'est qu'avec les révolutions américaine et surtout française du dix-huitième siècle qu'elle a signifié un bouleversement total, un recommencement radical, tabula rasa, année zéro, calendrier nouveau, etc. ... Et là-même, l'idée de révolution signifiait un retour aux sources, un retour à l'origine, une refondation, etc. - d'où la Révolution française jouée en costume romain de Marx. Cette idée reste même présente dans les révolutions russes, notamment dans leurs composantes populistes, anarchistes, nihilistes, socialistes - revenir au mir, la terre commune des paysans, retrouver la justice originelle, le communisme primitif, avant l'appropriation, la division, les inégalités, etc. La révolution a donc quelque chose à voir avec la tradition des origines, la transmission de la source. On peut affirmer aussi que seule la révolution est traditionnelle, et que nous avons sans nulle doute plus que jamais besoin de renouer avec la grande tradition des révolutions - l'ethos contemporain étant permissif-contrôlé, sociétal-totalitaire, conforme-revendicatif, etc., tout ce que tu voudras - mais tout sauf révolutionnaire !

J'aime bien l'idée de complot populaire (les serments des luddites !), de conjuration à ciel ouvert, et toute révolution à venir ne pourra que s'enraciner dans le sentiment populaire réel, la common decency, le sentiment de justice - et surtout d'injustice - des petites gens, petits bourgeois, petits blancs et assimilés, prolétaires et prolétaroïdes, chômeurs, chômistes, intellectuels déclassés, filles mères, péquenauds et autres "périphériques", etc., bref dans les valeurs morales élémentaires qui restent, n'en déplaise à la "militance sociétale" des LGBT, très traditionnelles : justice, courage, virilité/féminité, amitié, violence, solidarité, etc.

Bref, les valeurs des classes populaires démolies qu'exprimait assez bien en contexte américain le roman de Chuck Palahniuk Fight Club... Un populisme assumé et offensif. Je crois beaucoup à la réappropriation populaire et à la dissémination de pratiques communautaires autonomes ou tendant à l'autonomie : potagers collectifs, élevages locaux, échanges directs, assemblées locales, clubs de boxe, clubs de tir, associations de chasseurs, gangs de motards, formations survivalistes, etc. Il faut y aller tous azimuts, à la base, en ignorant royalement toutes les étiquettes pseudo-partisanes.

La révolution passera par cette réappropriation, cette reviviscence, cette réinvention des traditions d'autonomie populaire, des traditions à proprement et pratiquement parler libertaires.

Il y a toutes sortes de révolutions : des révolutions nobiliaires, bourgeoises, libérales, nationales, conservatrices, industrielles, etc. La révolution à venir viendra d'une réaction populaire et transpartisane - supra- ou infra-partisane. Elle va agglomérer les sentiments (et je parle bien de sentiments, la politique du peuple étant une politique des sentiments) populaires/populistes, anarchistes/anarchisants, antieuropéistes, anticapitalistes, antiétatistes, antitechnocrates, anti-impérialistes, antilibéraux, provinciaux, régionaux/régionalistes, locaux/localistes, ruraux/ruralistes, moraux/moralistes, justicialistes, patriotiques, et même des relents xénophobes et racistes, etc., et, pas bégueule pour un sou, elle prendra tout : des troskistes, des frontistes de gauche ou nationaux, des cégétistes, des communistes, des abstentionnistes, des droitards, des gauchistes, des écolos, des roycos, des cathos, des laïcards, des rien du tout, des sans parti, etc.

Certains l'ont bien compris, comme en témoignent la soraline et la dieudonnite, ce néo-drumontisme contemporain qui est le populisme des imbéciles. Comme en témoignent aussi la montée en puissance du lepénisme et la réelle "lepénisation des esprits" que n'arrêtera aucune incantation antiraciste, droit-de-l'hommiste, etc. Une révolution, c'est un gros bordel, pas moyen de faire dans le détail... Mais entre la soraline et la moraline, il va falloir la jouer à la fois fine et brutale. Soral se rêve d'ailleurs un destin à la Robespierre : on pourrait lui abréger le parcours.

Bon, pour le bon gros sous-entendu "royal-royaliste" de la question, je vais être obligé à un peu d'autobiographie (et puis ça me fait plaisir) : J'ai été militant royaliste exactement 3 ans, mes 3 années de lycée, mes 14, 15, 16 ans. Après, ce fut Immédiatement. J'étais depuis septembre 1993 chez les Cadets du Roi, groupe autonome fondé en 1992 à Toulon par mon ami Luc Richard, et très vite "numéro 2" et "rédac'chef" de notre fanzine, La Lanterne, qui en septembre 1996, fusionnant avec les équipes d'Insurrection à Paris et des Guêpes à Lyon, deviendra Immédiatement... On faisait de l'agit'prop', pas mal de choses avec nos amis les Jeunes Royalistes d'Aix et Marseille, un autre groupe autonome, les Chevaliers du Poignard, des motards dandies, et aussi, comme Luc est allé étudier à Lyon, avec les Camelots du Roi de la capitale des Gaules. Mais on n'a jamais été d'AF, même si on a fait des trucs ensemble, surtout des coups d'éclat, de l'agit'prop... On était même tous avec toi partis libérer le val d'Aoste en 1995, une marche aux flambeaux mémorables, la nuit, la neige, le col, la frontière, et l'auberge où nous nous sommes cassés la voix à changer avec les indépendantistes valdôtains.

Je n'avais pas encore 16 ans. Peu avant, dans un édito de La Lanterne, j'avais écrit "nous sommes les anarchistes blancs, les royalistes révolutionnaires". Pour nous, le royalisme, c'était une forme d'anarchisme, c'était l'anarchie couronnée, nous étions des "légitimistes révolutionnaires" (cf. Boutang, la "légitimité révolutionnaire"), on était plus proudhoniens que maurrassiens, et nos adages préféré du vieux étaient "la monarchie c'est l'anarchie plus un" et, bien sûr, "la liberté ne se donne pas, elle se prend" (dans sa version murale de Mai 68). On allait discuter avec les anarchistes de la FA, etc. Bref, ni catéchisme maurrassien, ni souvenir bourbonien !

On foutait bien le oaï à Toulon, entre agit'prop et blagues de potaches... On aimait bien l'essence et le feu, les collages, les bombages, tout ça... Nos modèles, c'étaient le Cercle Proudhon, Sorel, l'anarcho-syndicalisme, le Lys Rouge, la NAF (mais pas la NAR d'alors trop soc-dém), les maorrassiens, etc. On était régionalistes, autonomistes, indépendantistes... Je me souviens, encore au lycée, je dessinais sur mes feuilles des cours des lys noirs à côté desquels j'écrivais "Le Lys Noir" dans une graphie un peu façon Nation Française, rêvant d'un journal et d'un mouvement "anarcho-royalistes"... (sic)

Le royalisme, pour moi, c'était l'adolescence, l'effervescence, l'irrévérence, l'insolence, c'était un beau bras d'honneur à l'époque, anarcho-dandy, barock'n roll, on préparait la révolution, actions cagoulées, entraînements aux lance-pierres, aux manches de pioches, aux cocktails Molotov, aux armes à feu... On allait tirer dans les collines avec des Sten parachutées pour la Résistance ! C'était très romanesque, très romantique - mais tout cela a pris sens quand nous étions avec des centaines de milliers de manifestants, dont des milliers d'émeutiers, dans les rues de Gênes, Barcelone et ailleurs.

Le royalisme, c'est la forme la plus romantique de l'opposition à la civilisation moderne. C’est pour ça que j'aime bien le Lys Noir, déjà parce que ça me fait beaucoup rire, non de moquerie, mais de jubilation, ça me fait penser au national-dadaïsme que nous délirions avec un ami : Royal-Dada ! (Je suis d’ailleurs sujet patagon, naturalisé avec les miens par le Consul Général - comme la plupart de mes amis proches.) Enfin, tout cela était très potache, très jeune, très littéraire, très dandy, très sympathique, et finalement, ça a donné Immédiatement. J'avais dix-sept ans. "On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans." N'est-ce pas ?

Voilà pour le "royalisme révolutionnaire". Immédiatement, c'était autre chose, "revue littéraire et politique", c'est-à-dire à la fois plus métapolitique ("culturelle") que le royalisme, et plus directement politique - dans le souverainisme notamment. Bon, c'était à l'origine une revue faite par des royalistes ( des anciens d'AF-Paris : Sébastien Lapaque, Stéphane Tilloy, Louis-Xavier Perez, Jean-Paul Duarte, d'AF-Lyon : Nicolas Vey, et des anciens Cadets du Roi toulonnais : Luc Richard, Nicolas Vimar, moi-même) mais ce n'était pas une revue royaliste. C'était une revue bernanosienne, "gaullo-bernanosienne", avec un côté "gaulliste révolutionnaire", etc. On s'inscrivait dans la continuité de la Résistance française, des royalistes aux communistes, "celui qui croyait au ciel, celui qui n'y croyait pas", Bande à part de Jacques Perret, etc. L'angle était dès le début antitotalitaire, anticapitaliste, antimoderne.

Ce sont mes vraies années de "formation intellectuelle", sur le tas, tout en étant en hypokhâgne à Louis-le-Grand puis étudiant à Sciences-Po-Paris. Des années de lecture (et d'écriture) : Georges Bernanos, Simone Weil, Guy Debord, Ernst Jünger, George Orwell... Et bientôt l'Encyclopédie des Nuisances, Tiqqun, etc. Des années d'effervescence, de rencontres : quand on fait la liste des personnes qui sont intervenues dans Immédiatement, sous forme d'articles, d'entretiens, et même de conférences du Cercle Immédiatement, c'est impressionnant : Michel Houellebecq, Emmanuel Todd, Gilles Châtelet, Serge Latouche, Jean-Claude Michéa... Des dizaines de noms comme ça - Max Gallo, Régis Debray, Pierre-André Taguieff, etc. Des tas d'écrivains aussi, comme Frédéric Fajardie, Jérôme Leroy, François Taillandier, la chronique de Philippe Muray, etc., on publiait une nouvelle dans chaque numéro. Et puis des tas de journalistes, bien reconnus depuis : Philippe Cohen, Elisabeth Lévy, Joseph Macé-Scaron, j'en passe et des meilleures...

On a participé à la création de la Fondation Marc Bloch devenue Fondation du 2 Mars, j'ai créé avec David Todd, le fils d'Emmanuel Todd, la section Sciences-Po de la Fondation Marc Bloch, on a organisé un débat avec les Verts Sciences-Po un débat "démocratie de marché ou république sociale" entre Henri Guaino et Daniel Cohn-Bendit, le grand amphi était plein à craquer, Richard Descoing a refusé les télés... Sous l'influence plus politique des anciens d'AF qui étaient aussi les aînés - le "politique d'abord" - la revue a soutenu la candidature du RPF de Pasqua aux élections européennes de 1999, puis celle de Chevènement aux élections présidentielles de 2002. L'idée était alors de promouvoir et soutenir toutes les propositions politiques souverainistes, pour que ça ne se résume pas au Front national... C'était un peu la tendance "national-républicaine" d'Immédiatement, incarnée surtout par les anciens d'AF, assez jacobins en fait, et qui cherchaient leur Monck dans les candidats du moment... Jacques de Guillebon nous a rejoint au début du millénaire, on est devenus de plus en plus situationnistes, anticapitalistes, anarchistes, écologistes, anti-industriels, technophobes - ou plutôt, cette tendance des "jeunes" s'est de plus en plus exprimée dans la revue.

En juillet 2001, c'est l'inévitable scission, qui recoupe à peu près les tendances de la création : Sébastien Lapaque, soutenu par Stéphane Tilloy, Nicolas Vey, Louis-Xavier Perez, tente un putsch contre Luc Richard pour reprendre le contrôle total de la revue, et tente de placer Jérôme Besnard, qui naviguait plutôt dans les eaux d'AF... Le vieux fantasme maurrassien du coup de force, tenté en interne ! De l'autre côté, Luc Richard, Véronique Hallereau, Nicolas Vimar, Jean-Paul Duarte qui était devenu militant CNT... Le puputsch, comme on disait pour se marrer, tourne au fiasco, et toute l'équipe putschiste quitte la revue, juste avant notre départ pour Gênes. Il y avait aussi un différend idéologique, entre les "maurrassiens-républicains" et les "anarcho-situationnistes"...

Dans la foulée nous partons pour Gênes, avec Jean-Paul, Luc, et un ami marseillais connu à notre époque royaliste, mais qui a évolué vers le situationnisme. Là, nous rejoignons directement le Black Bloc, où évoluaient aussi Julien Coupat et l'équipe de Tiqqun, et participons plus qu'activement à toutes ses actions - même légales... Nous en avons fait le récit détaillé dans Immédiatement (disponible sur internet) : nous étions à la pointe avancée de toutes les actions, et avons assisté/participé à tous les évènements les plus aigus - dont l'assassinat de Carlo Giulani, juste à nos côtés. Nous partons dans les mois qui suivent, avec Jacques, Luc et Jean-Paul, rejoindre le Black Bloc à un contre-sommet européen à Bruxelles, puis au printemps suivant à Barcelone.

Nous devenons de plus en plus nous-mêmes, c'est-à-dire anticapitalistes, écologistes, etc. Et en même temps de plus en plus chrétiens, dans une lecture prophétique, apocalyptique, révolutionnaire, anarchiste voire communiste du christianisme. De plus en plus radicaux, et de plus en plus chrétiens en même temps. Je lis Girard, Ellul, la Bible, les Pères de l'Eglise, les grands théologiens, nous théorisons et pratiquons avec Jacques la "Théologie directe", etc.

A partir de 1999 je bourlingue pas mal aussi, passant la moitié de mes années en Inde, Chine, etc., soit en voyage, soit en missions auprès des plus pauvres. En 2002, Luc décide d'aller vivre en Chine, et le soviet rédactionnel m'élit directeur (et Jacques rédac'chef) à l'unanimité et en mon absence, puisque j'étais parti au Maroc plusieurs mois accompagner un ami dans une étude de terrain d'anthropologie religieuse... J'abrège : l'équipe est réduite et dispersée, il faut clore l'aventure en beauté, la finir et la finaliser, nous finissons par deux numéros très importants, le N.23 en 2003 "Et soudain le Christ", notre coming out intellectuel chrétien, et le dernier numéro, le 24, en 2004, qui récapitule toute l'aventure en revenant au politique : "Populisme ou barbarie". Apologie d'un populisme enraciné dans le christianisme populaire et la morale des gens ordinaires. Puis en 2005 le livre collectif d'Immédiatement : Vivre et penser comme des chrétiens - en référence à Gilles Châtelet et Léon Bloy. Ite missa est.

Tu vas te fâcher, mais la question du royalisme est pour moi un peu dépassée - cela fait partie de mon héritage politique, mais je ne suis ni fétichiste ni passéiste. Idem pour mon anarchisme, qui ne se reconnaît pas trop dans ses formes dogmatiques : le catéchisme de la FA, non merci. Comme j'aime bien dire, l'AF est au royalisme ce que la FA est à l'anarchisme : une Eglise, un conservatoire, un musée vivant... Ce qui compte, dans un mouvement comme Immédiatement de même que dans une vie politique, c'est la ligne de basse, la basse continue, le continuo. Le mien est là depuis l'adolescence, et même l'enfance : sentiment profond et indéracinable de révolte contre le monde moderne, contre la société industrielle : écologisme profond, technophobie, haine de l'injustice sociale, amour de la campagne et aussi de la nature sauvage. Goût des traditions populaires, des langues disparues, des dialectes vivants, de la bigarrure du monde détruite par le rouleau-compresseur de la mondialisation. Détestation de l'uniformisation. La politique est avant tout une question de sentiment, de sensibilité, de coeur, pour parler comme Pascal, les principes premiers se sentent, la raison vient ensuite les développer, défendre, déployer.

2005, Jack et moi sortons nos premiers bouquins, écrivons dans la presse catholique (La Nef, L'Homme Nouveau, etc.), je participe aux débuts de l'Observatoire sociopolitique à Toulon, diffuse dans des essais "théologico-politique" (toujours l'idée de "théologie directe", appliquée à la vie),des articles, des conférences, etc., la vision d'un christianisme radical, social, intégral, écologique, d'une "écologie intégrale", je lis ou relis Ellul, Charbonneau, Thoreau, Gandhi, Lanza del Vasto, Tolstoï, etc., je passe plusieurs années à l'étranger (Chine, Palestine, Cambodge...), change tous les ans ou deux ans d'activité, publie aussi des récits de voyage et pèlerinage, me marie, aie trois enfants, et en 2012 je reviens en France et avec Captain Jack nous résumons un peu tout ça, notre parcours intellectuel, dans notre pavé L'anarchisme chrétien (qui sort cette année en nouvelle version, revue, corrigée, augmentée) : l'"anarchisme chrétien", ce n'est ni une doctrine, ni un slogan, ni un parti, c'est juste une expression frappante et à première vue antinomique pour désigner une constellation ouverte et un sentiment métapolitique, c'est aussi anarchiser les cathos et évangéliser les anarchos, en tout cas faire bouger les lignes, toujours... Mais bon, on ne va pas non plus en faire une icône, un parti politique, une nouvelle secte, un prestige symbolique, etc.

2012, je reprends aussi du service à l'OSP, c'est la lutte contre le mariage pour tous, dans laquelle le diocèse de Fréjus-Toulon est très impliqué, et qui vois le soulèvement d'une jeunesse chrétienne prête à en découdre (comme dit le Comité invisible dans leur dernier texte, A nos amis, même les peigne-culs de Versailles à la nuque rasée ont pris goût aux échauffourées avec les flics) et de sentiment souvent anarchisant et écologisant : enfin la génération que nous attendions depuis dix ans, la relève, la quille ! Je vis depuis six mois en Polynésie française, les pieds dans l'eau, mais reste impliqué à distance dans tout ce qui précède, par l'écriture militante, en polygraphe compulsif et sans emploi...

Voilà. Une partie de l'esprit (et des collaborateurs réguliers) d'Immédiatement s'est retrouvée autour d'Elisabeth Lévy dans Causeur, qui fait du bon boulot mais dans lequel je me reconnais peu : c'est tout le côté plutôt politique, nouveau réac, journaleux, national-républicain, écrivaillon, parigot d'Immédiatement qui s'est perpétué et renouvelé là-dedans. J'aime bien, mais c'est un peu les bobos anti bobos, les bobos réacs, le Marianne de droite... Disons qu'à l'époque on a fait bouger les lignes, et que les nouvelles lignes se sont figées, cristallisées, sédimentées... Je regrette Immédiatement, car je ne trouve rien d'équivalent (non pas de similaire) dans la presse aujourd'hui. Après, il y a plein de sites, de blogues de jeunes talentueux dans cet esprit, comme Philitt, webzine "souverainiste et antimoderne". Bref, la relève est assurée, mais il faut passer à autre chose, avoir quelques coups d'avance. Je pense qu'il va se faire bientôt du neuf, qu'on va refaire bouger les lignes, que les prochaines années vont être mouvementées.

Je me retrouve bien dans Tarnac, Pièces et main d'oeuvre, L'échappée, Le pas de côté, La lenteur, l'écologie radicale, le bio-régionalisme (et même l'anarcho-primitivisme) etc. Critique sociale et écologie radicale. Si je devais résumer mes positions politiques (écologisme, populisme, localisme, anarchisme, bien-communisme, communalisme, mutualisme, associationnisme, etc. / anticapitalisme, antilibéralisme, antiétatisme, anti-impérialisme, antiproductivisme, etc), ce serait écologie et autonomie, autonomisme : autonomie politique, autonomie locale, autonomie associative, autonomie scolaire, autonomie universitaire, énergétique, économique, monétaire, communale, agricole, vivrière, religieuse, familiale, individuelle, etc. Tendre vers l'autonomie locale maximale et favoriser tout ce qui tend vers cette autonomie - donc l'écologie, bien sûr.

Après, la royauté, pourquoi pas ?, comme Orwell qui imaginait que la révolution socialiste pourrait même s'offrir le luxe de garder comme héritage national les impériales et la monarchie... Mais c'est trop tard. Et quand on voit ce que sont les monarchies européennes aujourd'hui, les familles royales, princières, etc., on voit bien qu'elles font partie de l'oligarchie. Elles ont déchu, leur temps est révolu. Mané, thécel, pharès.

Elles ne sont même pas dignes de la guillotine.

(Entretien paru dans Le Lys Noir N. 15)

De la souveraineté

La souveraineté est un curieux exemple de ces concepts qui sont valables dans un ordre des choses et illusoires dans un autre. Il perd son poison quand il est transféré de la politique à la métaphysique. Il y a dans l'ordre spirituel un concept valable de souveraineté. Dieu, le Tout séparé, est Souverain sur le monde créé.

Dans l'ordre politique, et à l'égard des hommes ou des organes qui sont chargés de guider les peuples vers leurs destinées terrestres, il n'y a pas d'usage valable du concept de souveraineté. Parce qu'en denière analyse, nul pouvoir terrestre n'est l'image de Dieu, ni le vicaire de Dieu. Dieu est la source même de l'autorité dont le peuple investit les hommes ou ces organes, mais ils ne sont pas les vicaires de Dieu. Ils sont les vicaires du peuple, et ils ne peuvent être divisés du peuple par aucune propriété supérieure essentielle.

Aux Yeux d'une saine philosophie politique, il n'y a pas de souveraineté, c'est à dire de droit naturel et inaliénable à un pouvoir suprême transcendant ou séparé, dans la société politique. Ni le prince, ni le roi, ni l'empereur n'étaient réellement souverains, bien qu'ils portassent le glaive et les attributs de la souveraineté. L'Etat non plus n'est pas souverain ; ni même le peuple. Dieu seul est souverain.

Jacques Maritain, L'Homme et l'Etat, 1953.

Des formes d'actions nouvelles

Il n'est pas exclu d'inventer des formes d'actions nouvelles. Par exemple, nouer tout de suite une vaste conspiration pour la destruction des documents officiels relatifs au controle des individus par l'Etat, destruction qui peut être opérée par des procédés très variés, incendies, etc ; cela aurait des avantages immédiats et immenses.

Simone Weil, L'Enracinement, 1943.

Un devoir d'incrédulité totale

Notre premier devoir est d'incrédulité totale à l'égard de tous les projets de l'imagination politique, sociale, économique, scientifique, technique, religieuse, à toutes les perspectives sur l'avenir de l'homme et du monde qui ne soient pas fondées sur la nature humaine et sur la nature des choses elles-mêmes déterminées par une mesure au-delà de laquelle il n'y a plus l'homme, ni de monde, mais leurs simulacres. Je ne connais point, pour ma part, de poison plus mortel à l'homme que les excitants idéologiques - qui sont tous à base de vision de l'avenir et que les manipulateurs des propagandes inoculent aux masses pour s'emparer du pouvoir -- sinon les tranquillisants de tout acabit qui nous sont proposés sous forme de sécurité pour endormir nos inquiétudes et nos déceptions La formule « L'homme, c'est l'avenir de l'homme » que Teilhard a reprise,, combinée avec le sédatif d'une socialisation croissante qui nous assure une existence garantie contre tous risques, de la naissance à la mort, c'est la mort même de l'intelligence.

En un mot, les dogmes de l'évolution, du progrès, de la nouveauté, etc... qui nous expulsent de notre réalité véritable, qui nous dopent et nous hypnotisent à la fois, doivent être soumis à chaque instant par nous à la plus sévère et la plus impitoyable des censures, si nous voulons redevenir des hommes réels, implantés dans une civilisation réelle.

Marcel de Corte.

Fédéraliste

Je suis fédéraliste parce que je suis personnaliste. La personne est à la fois ce qui, dans chaque être, est le plus singulier et ce qui relie à son prochain, le fait entrer dans une communauté. On trouve dans cette définition le germe de tout fédéralisme bien conçu : la vacation qui distingue et relie à la fois, qui fait de l'individu un être unique et qui, en s'exerçant, devient créatrice de communauté.

Denis de Rougemont, Le XXe siècle fédéraliste, Pourquoi je suis fédéraliste, av.-juin 1971

La France et la démocratie selon l’abbé Sieyès

Le peuple, je le répète, dans un pays qui n'est pas une démocratie (et la France ne saurait l'être), le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses représentants.

la France n’est point, ne peut être une démocratie, elle ne doit pas devenir un Etat fédéral, composé d’une multitude de républiques, unies par un lien politique quelconque.

La France est et doit être un seul tout, soumis dans toutes ses parties à une législation et à une administration communes. Puisqu’il est évident que cinq à six millions de citoyens actifs, répartis sur vingt-cinq milles lieues carrés, ne peuvent point s’assembler, il est certain qu’ils ne peuvent aspirer qu’à une législature par représentation. Donc les citoyens qui se nomment des représentants renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes immédiatement la loi : donc ils n’ont pas de volonté particulières à imposer. Toute influence, tout pouvoir leur appartiennent sur la personne de leurs mandataires ; mais c’est tout. S’ils dictaient des volontés, ce ne serait plus cet état représentatif, ce serait un état démocratique.

A la Constituante le 7 septembre 1789.

Les méfaits de l'Instruction Publique

Ce que la droite a oublié

La droite a oublié que son seul véritable ennemi est l'argent, et qu'elle devait de ce fait s'éprouver comme l'alliée objective de tout ce qui conteste le système de l'argent. Elle est passée par paliers du côté de ce système. Elle était mieux placée que quiconque pour défendre, en les reformulant, des valeurs anti-utilitaristes de gratuité et de désintéressement. Peu à peu, elle s'est convertie à l'axiomatique de l'intérêt et à la défense du marché. Parallèlement, elle est tombée dans l'ordre moral, le militarisme, le nationalisme, qui n'est qu'un individualisme collectif que les premiers contre-révolutionnaires avaient compris comme tel.

Alain de Benoist.

Physiognomonie de la profession

Une expression harmonieuse et comme vitalement assumée du métier.

ll y a une espèce de physiognomonie de la profession dont il serait trop long d'entreprendre ici l'analyse, même d'une manière superficielle, mais dont on peut constater aujourd'hui l'évolution profonde : à l'expression harmonieuse et comme vitalement assumée du métier de jadis et qui transparaissait dans les figures classiques du médecin de campagne ou de l'artisan avec toute leur allure organique, s'est substituée une sorte de stéréotypie abstraite qui ne tient plus au voeu intime de la profession et au modelage des traits qu'elle opère par intussusception de l'esprit et de la vie, du moral et du physique, mais au travail secret des complexes psychiques libérés par la carence de cet élément fondamental, et qui dénonce combien la profession est devenue indépendante du sujet lui-même : apparaissent ainsi à l'observateur la figure molle, bouffie, vulgaire, au teint blafard et huileux, de tant d'hommes d'affaires d'aujourd'hui, avec cette dévitalisation caractéristique des traits qui souligne combien le gôut de l'argent est chez eux une passion abstraite, ou encore le faciès terne, grossier et immobile de l'ouvrier prolétarisé, du manoeuvre pour qui le métier est une pure dénomination extrinsèque. Ces produits du capitalisme moderne nous montre combien la profession est de nos jours la traduction d'une personnalité littéralement éteinte, qu'elle ne sculpte plus de l'intérieur, en vertu de l'énergie morale qui l'a choisie, la figure de l'individu, mais qu'elle s'impose à lui de l'extérieur comme un masque. Rien ne subsiste des puissance vivantes qui l'ont engendrée, chacune selon son ordre et son degré : il ne reste plus qu'un aspect extérieur, figé, interchangeable, une figure abstraite. Là où il n'y a plus d'amour, il n'y a plus création.

Marcel de Corte, Philosophie des mœurs contemporaines,1944.

Une figure molle, bouffie, vulgaire, au teint blafard et huileux.

Une occasion manquée

Visiter le lieu de l'explosion

Que sont devenus les fortifications ?

Et tout le reste n'est que

Couverture de PICABIA pour la revue LITTÉRATURE, 1922

L’ASSOCIATION LIRE SOUS LE VENT

Avec le concours de LA MAIRIE DE UTUROA

Présente une conférence de RICCARDO PINERI

professeur des universités

sur le thème :

LA LITTÉRATURE ET LE SACRÉ



Le vendredi 20 mars à 17h00

Dans la salle des mariages de la mairie de Uturoa

Le conférencier, auteur d’ouvrages sur les peintres Adrian Gouwe, Jean-Charles Bouloc et le plasticien Andréas Detloff, dédicacera ses œuvres.

L'Ordre et le Progrès

L'Ordre

Le Progrès

Skaisme !

Panaït Istrati, Bilili et Nikos Kazantzaki en Ukraine

Un homme cruel

Je lui reproche moins l'indépendance de l'Algérie que la honte, le sang qui en furent le prix, les corps torturés des dix-mille harkis, les cités blanches investies et occupées comme des villes ennemies, les hommes hier poussés au désespoir et à des crimes par la menace du déracinement, et aujourd'hui traqués, humiliés, emprisonnés, condamnés. Jamais Charles de Gaulle n'a laissé tomber un mot de tendresse ou de pitié pour ce peuple arraché cependant à ses sources, jamais un geste d'encouragement, un don personnel, afin d'aider tous les braves gens qui se débattent dans les pires peines pour assurer aux harkis réfugiés une existence moins précaire. Non, cette cruauté me repousse loin de l'homme, malgré son énergie ; loin de l'oeuvre, malgré ses aspects positifs. Elle frappe d'indignité l'Etat tout entier. Car l'Etat n'est pas un "monstre glacé", il est aussi le gardien de la justice et de la fraternité. Nous ne voulons pas d'un Etat fondé sur l'injustice.

Philippe Ariès, Examen d'un régime, La Nation Française, 2 janvier 1963.

Philippe Ariès vu par Michel Foucault

- Après la mort de Philippe Ariès, le 8 février, Michel Foucault et Arlette Farge lui rendent hommage dans un entretien avec deux journalistes du Matin de Paris.

- Sur le point de faire paraître les tomes 2 et 3 de l’Histoire de la sexualité, Michel Foucault (1926-1984) rappelle la dette qu’il a envers Philippe Ariès comme il l’a fait quelques jours plus tôt dans le Nouvel Observateur : "Le souci de la vérité", (17 février 1984). En effet, l’historien a publié, en 1961, dans la collection « Civilisations d’hier et d’aujourd’hui » qu’il dirige chez Plon, l’Histoire de la folie. Dans les années post 68, dans la foulée des réflexions autour de l’école, s’opère un rapprochement entre l’Enfant et la vie familiale sous l’Ancien régime et les analyses du philosophe Michel Foucault autour de l’idée d’une modernité qui serait le lieu d’une « mise à part », d’une quarantaine des enfants.

- Spécialiste des archives judiciaires, auteur notamment du Goût de l’archive (Seuil, 1989), Arlette Farge, historienne du 18e siècle, étudie les comportements populaires, la foule, l’opinion publique, la famille ou les sensibilités. Deux ans avant cet entretien, elle a publié avec Michel Foucault, Le désordre des familles. Lettres de cachet des Archives de la Bastille. Elle a participé au volume 3 de l’Histoire de la vie privée (De la Renaissance aux Lumières) dirigé par Philippe Ariès.

EXTRAITS DE L’ENTRETIEN

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Matin de Paris

Vous avez dit de ses écrits qu’ils créaient une « stylistique de l’existence », qu’ils étaient attentifs « aux gestes muets qui se perpétuent ». Ne peut-on pas dire la même chose de vos travaux ?

Michel Foucault

Philippe Ariès a été l’initiateur. Il tenait beaucoup à l’idée qu’entre un geste représenté dans le tableau le plus rare et toute la nappe des gestes quotidiens, il pouvait y avoir quelque chose de commun à lire. Ici et là il voyait une mise en forme de l’existence, de la conduite, du sentiment -un style d’être qui leur était commun. Et en cela je crois qu’Ariès est un précurseur important pour toute une série de recherches qui se font actuellement. Ainsi, un historien de l’Antiquité tardive, Peter Brown, accorde à la notion de style, dans les rapports humains, dans les comportements, une importance considérable. Je ne suis pas sûr qu’Ariès ait utilisé précisément le mot « style », mais c’est de cela qu’il était question.

Arlette Farge

Ce qui est très important, c’est le moment où arrive Philippe Ariès, après Lucien Febvre, pendant la rupture des années soixante : quand on a rompu avec les « acquis » du marxisme vulgaire. Et, chez Ariès, il n’y avait pas de dogme, pas de volonté de faire école ; il y avait plutôt une intuition, une naïveté, une capacité d’appréhender le réel d’une façon neuve. Et c’est pour ça, je crois, qu’il a rencontré quelqu’un qui lui aussi était en dehors des Annales, Robert Mandrou ; c’est pour ça qu’il a pu travailler avec lui dans l’approche de la psychologie historique, créer avec lui une collection d’histoire des mentalités. C’est un moment très important de l’historiographie française, mais peu connu.

Matin de Paris

Ariès et vous, vous avez contribué à modifier les sujets de recherche, Il suffit de penser aux titres d’ouvrages historiques récents : Le Purgatoire, Le Péché et la Peur 2, sont devenus des objets historiques. L’un comme l’autre, vous avez commencé une archéologie de la représentation.

Michel Foucault

Encore une fois, je crois que c’est Ariès qui est important, c’est lui qui a fait bouger les choses.

Arlette Farge

Vous avez eu, quand même, une démarche semblable en histoire, « iconoclaste ». L’apport d’Ariès, c’est celui du sensible, faire une histoire des sensibilités, c’était extrêmement subversif. Ariès s’opposait ainsi à un inconscient collectif et, en même temps, avec Robert Mandrou et après l’ouverture demandée par Lucien Febvre, il faisait découvrir tout ce qui relevait du quotidien. Et vous avez eu un apport comparable : la même rupture dans la méthode, d’abord. Je pense à Surveiller et Punir : vous travaillez à la fois sur les déplacements institutionnels et sur le regard porté sur les institutions. La démarche était aussi subversive.

Michel Foucault

Oui, mais Ariès était historien, a voulu faire oeuvre d’historien. Alors que moi, au fond, je faisais de la philosophie. Ce qui m’avait frappé, c’est que, en philosophie, aussi marxistes qu’aient été les gens à cette époque, et Dieu sait s’ils l’étaient, leur ignorance de l’histoire était, je ne dirais pas totale, mais principale. C’était une règle fondamentale chez les étudiants de philosophie : puisqu’on était marxiste, on n’avait pas à savoir l’histoire ; on la connaissait comme on connaît un vieux secret de famille dont le chiffre depuis longtemps a été révélé.

Arlette Farge

Vers la fin de sa vie, Ariès rejoignait un peu ce que vous étudiez dans les livres qui vont bientôt sortir. Il était responsable d’un des tomes d’une Histoire de la vie privée, au Seuil. Et il reprenait tous ces problèmes dont nous parlions à l’instant : le style, peut-être, mais à coup sûr la connaissance de soi, l’intimité, le retrait en soi. C’étaient là ses derniers axes de recherche : un travail sur le « en-soi », le « sur-soi ».

Michel Foucault

Et, là encore, nous nous sommes rencontrés sur une frontière commune, mais nous partions de deux domaines différents. En cherchant chez les philosophes de l’Antiquité la première formulation d’une certaine éthique sexuelle, j’ai été frappé de l’importance de ce que l’on pouvait appeler les pratiques de soi, l’attention à soi-même, la mise en forme du rapport à soi.

Arlette Farge

Et Ariès, l’an dernier, parlait aussi du goût, de la conscience de soi.

Michel Foucault

Il avait je crois parfaitement saisi que le rapport à soi, l’importance accordée à soi-même, la culture de soi, ne sont pas, comme on a l’habitude de le dire, un pur effet de l’individualisme. On peut parfaitement avoir des groupes sociaux qui ne sont pas individualistes, et dans lesquels la culture de soi existe. Un monastère n’est pas une institution individualiste, et pourtant la vie intérieure, l’attention à soi y sont extrêmement développées. Dans certains groupes du christianisme réformé, au XVIIe siècle, on attachait aussi une extrême importance à cette culture de soi, et cela dans des groupes, famille, communauté, paroisse, qui n’étaient pas individualistes. Ariès, si j’ai bien compris, était proche de ces problèmes...

Arlette Farge

Oui, mais il achoppait sur le problème de l’État. Pour lui, l’État n’existait pas ; il voyait la vie privée en dehors de l’État, alors que, pendant la période qu’il étudiait, du XVe au XVIIIe siècle, l’État devenait très prégnant. Et, lors des derniers mois, il avait essayé de reprendre le problème en tenant compte de l’État car il était ouvert à toutes les objections.

Notes 1 Repris dans Michel Foucault, Dits et écrits 1954-1988, t. 4, Ed. établie sous la dir. de Daniel Defert et de François Ewald avec la collaboration de Jacques Lagrange, Gallimard, 1994

L'antifascisme selon Manuel Valls

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