Nous sommes ceux qu'on dispersa

Dans les terres les plus lointaines.

Chacun de nous est un anneau

De la nouvelle chaine.

Non seulement à Babylone

Mais au bord des fleuves, partout

Nous sommes venus nous asseoir,

Cherchant un toit qui soit à nous.

C'est ainsi qu'est devenu cher

À notre coeur le monde entier,

Sur les rives les plus lointaines

Se trouve pour nous un foyer.

Et maintenant nous chérissons

La Vistule autant que le Rhin,

Le large Dniepr à notre coeur

Murmure aussi douce complainte

Le libre Hudson nous fait un signe

Fraternel du fond de ses flots,

Il est permis, sur son rivage,

De connaitre enfin le repos !

Quelque chanson que l'on écoute

Nous connaissons sa mélodie,

Quel que soit le fleuve qui coule

Il nous apporte la nostalgie,

Quel que soit le drapeau qui flotte,

Nous est familier son appel,

Quel que soit le bateau qui vogue

C'est vers un pays fraternel.

Avrom Reisen (1876-1953), Dans les terres les plus lointaines in Anthologie de la poésie yiddish, traductions de Charles Dobzynski, poésie Gallimard.