Seule doit être choisie

dans la terreur et le désastre

la parole qui allume

des constellations dans la nuit

Fille de Marie Noël et de Patrice de La Tour du Pin, mais aussi du plain-chant péguyen et claudélien, la poésie chrétienne aujourd’hui retrouve sa belle jeunesse et ses lettres de noblesse. En témoigne, en France, le poète Gwen Garnier-Duguy, dont la quête de joie se lie au sens du combat, dans une poésie pleinement catholique qui s’épanouit, comme la liturgie, dans une dimension cosmique et célèbre la refloraison du monde. Comme Péguy, comme Claudel, c’est un chant lumineux, mais aussi profondément enraciné, raciné même, qui soulève l’épaisse glèbe et la poussière volage pour les animer de souffle et de sang. Une poésie mystique, mais du Corps mystique, de la chair transpercée et transfigurée aux plaies de lumière. La poésie est messe sur le monde, liturgie laïque, prière profane qui sanctifie l’univers, danse des mots païens et convertis – illuminés, inspirés, insufflés d’Esprit. Elle est écho de la Parole créatrice, servante du Verbe rédempteur, fille du Souffle de vie. La poésie chrétienne, ce sont les noces de David et de la Sybille sous l’Arbre de la Croix. Fils spirituel d’Hildegarde de Bingen, Gwen Garnier-Duguy, veut ressusciter Pan – par l’onction poétique et le baptême du Nom.

Gwen Garnier-Duguy, Danse sur le territoire, Éditions de l’Atlantique, 2011, 42 p., 13 euros


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Les ondes

hertziennes

vrillent l’espace

les chimies

agricoles

privent nos voûtes

des chants d’insectes

des campagnes

ne monte plus

le vol des alouettes


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Le monde est au bord du monde

Il choisira de respirer les sarments de la joie

de s’élever dans la grandeur des orangeraies

de danser dans l’empreinte des oliviers

son projet pour nous porte l’étendard

de toute beauté


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Ce qui est empêché

chaque jour

de notre dimension d’homme

s’enfouit en douceur

dans la mémoire de notre être

demeure là – patient

jusqu'à constituer le terreau

par où la terreur changera de camp

et s’épanouira en pommier en fleurs


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Tu as le paradis

sur le bout de la langue

l’écorce des jardins délicieux

pour paume de la main

et la nuit qui sarcle ton cœur

y fait planer d’un souffle doux

les eaux ferventes

où tout est oint


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Après avoir veillé

comme un damné

béat devant la portée de tes rêves

tu as enseveli tes mains

dans la terre

tu as appartenu au monde

et tes pensées ont refleuri


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