Le croyant ancien est avant tout un homme qui se confesse, qui se confesse fréquemment, et d'autant plus souvent même qu'il se permet moins les actions que la morale catholique regarde comme des péchés. C'est un homme qui pratique l'obéissance intellectuelle, admettant en principe tout ce que l'Église enseigne, et acceptant sans examen tout ce qu'il connaît de cet enseignement ; ne discutant ni le sens ni la portée logique de ce qu'il croit ; se considérant dans l'Église comme un disciple qui apprend d'elle ce qu'il doit penser sur tous les grands sujets qui intéressent l'existence, ce qu'il doit faire pour être homme de bien, ce qu'il doit pratiquer pour être chrétien. C'est un homme dont toute l'activité se trouve ainsi réglée par une autorité extérieure, et qui n'a pas souci de penser par lui-même, qui se croirait coupable de prendre cette hardiesse, qui regarde comme une vertu la timidité intellectuelle. Il se défend de penser sur les questions religieuses, par crainte de penser mal ; il s'instruit de la religion dans les bons livres que lui recommande son directeur, et il n'a pas d'autres idées que celles qui lui sont garanties comme très orthodoxes et très sûres. Ce type de catholique existe, il ne faut pas le nier. Il n'est pas très répandu, tout au moins ceux qui le réalisent dans la perfection ne sont pas nombreux, quoi qu'on ait fait pour les multiplier. C'est que ce type n'est réalisable qu'au prix d'une abdication contre nature, à laquelle beaucoup résistent comme d'instinct, et que d'autres repoussent consciemment comme une violation de leur personnalité.

Alfred Loisy