Le 1er Mai d'origine : ni muguet, ni "vrai travail", ni Jeanne

Le 1er mai 1886, les syndicats américains lancent une grève générale pour arracher au patronat la réduction de la journée de travail à huit heures. Pourquoi le 1er mai ? parce que, dans les entreprises américaines, c'était le jour de l'ouverture de l'année comptable et de l'expiration des contrats de travail... À Chicago, la grève se prolonge et dégénère en affrontements avec la police ; huit policiers sont tués, cinq ouvriers anarcho-syndicalistes seront condamnés à mort (malgré les constats de l'enquête) et pendus le vendredi 11 novembre 1887 : le Black Friday. Huit autres seront envoyés en prison à perpétuité. Dès 1893, les treize seront reconnus innocents et victimes d'une opération politico-policière contre le mouvement ouvrier naissant.




En France, le 20 juillet 1889, la IIe Internationale socialiste décide de faire de chaque 1er mai une journée de manifestation pour la journée de huit heures (donc la semaine de 48 heures, samedi compris). Le 1er mai 1891, à Fourmies (Nord), la police tire sur les ouvriers : neuf morts. Parmi eux, la jeune Maria Blondeau (1), 18 ans, qui tenait à la main une branche d'églantine – la petite rose des haies – que son fiancé venait de lui offrir. La fleur est teinte de son sang... En 1895, le socialiste Paul Brousse lance un concours dans son journal, invitant les travailleuses à choisir « la fleur du 1er mai ». Elles désigneront l'églantine rouge. Ce n'est que dans les années 1920 que ce symbole révolutionnaire sera remplacé par le neutre muguet (ou l'edelweiss en Allemagne, l’œillet blanc en Italie, etc)... Le muguet sera institutionnalisé par le régime de Vichy, et survivra néanmoins à 1944 – au point d'être vendu notamment au profit du PCF et de la CGT.




La fête nationale de Jeanne d'Arc n'est jamais le 1er Mai : cette année elle est célébrée le dimanche 13 mai ; elle le fut le dimanche 8 l'an dernier ; etc. Quel rapport entre le 1er Mai et Jeanne d'Arc ? Strictement aucun : sinon dans l'agenda propre au FN, parti qui serait bien en peine d'argumenter le prétexte johannique de son défilé rituel. Quant à la symbolique, un minimum de connaissances montre que la vraie Jeanne identifiait « la France » à la dynastie royale : ce qui ne semble être le cas ni des Le Pen, ni de Nicolas Sarkozy ! Par ailleurs, Jeanne ne fut pas canonisée (2) à cause de son engagement politique, mais malgré celui-ci, et pour des raisons exclusivement spirituelles comme il est de règle dans toute canonisation. (Raisons si complexes, en ce qui concernait Jeanne et son rapport à l'Eglise, qu'il fallut cinq cents ans pour les faire prévaloir).

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1. Les autres victimes :

Louise Hublet, 20 ans, deux balles au front et une dans l'oreille

Ernestine Diot, 17 ans, cinq balles, dont une dans l'œil droit et une dans le cou

Félicie Tonnelier, 16 ans, une balle dans l'œil gauche et trois dans la tête

Kléber Giloteaux, 19 ans, cinq balles, dont trois dans la poitrine et deux à l'épaule

Charles Leroy, 20 ans, trois balles

Emile Ségaux, 30 ans, cinq balles

Gustave Pestiaux, 14 ans, deux balles dans la tête et une à la poitrine

Emile Cornaille, 11 ans, une balle dans le coeur.

2. Pour canoniser Jeanne, Il a fallut mettre au clou les oripeaux scolastiques de sa condamnation par les très traditionalistes théologiens de Rouen (1431). Relire Bernanos, Les Prédestinés.

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2012/04/30/ni-muguet-ni-vrai-travail-ni-domremy-le-1er-mai-et-ses-origi.html