Aucune analyse sérieuse ne peut contester que les régimes qui s'autoproclament démocratiques sont en réalité ce que toute philosophie politique classique aurait appelé des régimes d'oligarchie. Une couche mincissime de la société domine et gouverne. Elle coopte ses successeurs. Certes, elle est libérale: elle est ouverte (plus ou moins...) et elle se fait ratifier tous les cinq ans ou sept ans par un vote populaire. Si la fraction gouvernante de cette oligarchie exagère trop, elle se fera remplacer - par l'autre fraction de l'oligarchie qui lui est de plus en plus pareille. De là la disparition de tout contenu réel dans l'opposition de la "gauche" et de la "droite. le vide effarant des discours politiciens contemporains reflète cette situation.

Cornélius Castoriadis, L'idée de révolution, le Débat n° 57, novembre-décembre 1989 in Le monde morcelé, les carrefours du labyrinthe-3.