Dans les états-majors du crime
les yeux aveugles des généraux
s’enflamment déjà aux futures hécatombes.
Mais ils ne pensent pas aux morts
ni même à la violence,
ce sont des gens très distingués
au coeur châtré
aux mots châtiés.
Il n’y a jamais de morts
dans les états-majors
mais des signes abstraits,
des statistiques et des courbes
des additions de matériel
des histoires de renfort
des ordres sans discussion
des avances sans murmures
des reculs sans hésitations
qui se traduisent sur la carte
en petits drapeaux enfantins.
Car une erreur de calcul
ou la mesure d’un dessin
ne laisse pas de sang aux mains



Pierre Boujut, Défense de l'homme, n°3, décembre 1948.