Te souviens-tu ce temps, à la lisière du jour

Où je disais ton nom, les dix doigts entrouverts

Cherchant des yeux livides les marques d’un secours

A l’oratoire fleuri de ta statue de pierre ?

Te souviens-tu toujours ces portes entrebâillées

D’où j’entendais des voix au sommet de la joie

Et qu’entre elles et moi comme une icône vitrée

Ton souffle s’interposait, immense croix de bois ?

Te souviens-tu ces heures où brisant l’immortel

Je tentais de douter, dissipant ta présence

Derrière des paravents constellés de dentelles

D’où me suivait ton œil comme une larme immense ?

Te souviens-tu aussi, au livre des souvenirs

Des pleurs que je pendais comme un collier de perles

Dessinant à la plume l’envie de repentir

M’étonnant de te voir si puissante et si frêle ?

Te souviens-tu encore, dans la fusion des rires

De mes longs bras tendus à mes vœux exaucés

Toi, blanche, qui prenait part à mes élans de vivre

Ton corps comme un palais et tes bras boucliers ?

Te souviens-tu encore, Marie, petite pierre,

Délavée par la pluie dans ta niche oubliée,

De ton enfant pressé qui passe le poing levé,

T’adressant un « Ave », Marie petite pierre ?

8 avril 1970