La conquête étatique crée aussi l’homme qui lui cède : l’individu moderne, l’être pour lequel il ne saurait exister d’ordre en dehors des contraintes extérieures de l’État. Il est aujourd’hui impossible de dire si le progrès de l’État naît de la destruction des liens sociaux ou s’il l’engendre. L’ordre extérieur de l’État crée le désordre social qui le rend nécessaire. Là où l’individu sentait en lui l’autorité qui règle les choses, il ne sent plus que le caprice qui les trouble ; il ne sait plus ordonner, nouer de lui-même des liens avec les hommes et les choses.

Bernard Charbonneau