Dans la chair de la femme couve un feu divin. Un cœur brûlant d’amour dort et veille en son sein. Son corps chaud et tendre repose. Un souffle lent et profond soulève son ventre et gonfle sa poitrine. Son corps nu alangui repose dans la prairie. Elle dort, devant l’arbre de vie. Et l’homme la regarde, et n’ose poser main sur son sein.

Elle dort et ne sait pas encore ni l’homme ni les roses, ni comment brillent les choses au jardin d’innocence. Elle dort. Son regard encore clos, vierge de toute vision, repose en dedans. Elle dort, mais sent déjà l’odeur des roses, mais ne sait comment vont les choses quand on écoute le serpent au sifflement du doute. Elle dort. Sa chair repose. Son âme, libre de tout tourment, plonge dans la paix des songes. Elle dort dans l’herbe, nue, belle, vierge de tout serment.

Future mère des vivants, elle ne sait pas les drames qui dorment en son sein. Elle ne sait pas la procession mortelle, pleine de vie et de sang, ancrée en ses entrailles, des myriades de drames que porte déjà son ventre, son doux ventre, son beau ventre, blanc, innocent, encore vierge d’enfant.

Elle dort. Son corps s’allonge sur la fraîcheur des prés. L’homme la contemple. Il n’ose la toucher. Il n’ose l’éveiller. Il contemple et admire cette chair à étreindre, cette âme à atteindre, cette bouche à baiser, ce corps à embrasser, ces bras à enlacer, ce sein à caresser, ce ventre à féconder, ce mystère à l’orée, abîme où pénétrer, os de ses os, chair de sa chair, à aimer et à perpétuer, pour ne faire qu’une seule chair, et ces jambes serrées, et ces pieds petits et tendres qui partout le suivront.

Amour de lui pour elle, désir fleuve montant, qui ne sait rien encore du fruit et du tourment, du désir de durer.

Ses cheveux éparpillés couronnent son visage. Les yeux encore fermés, elle dort, pour le moment, et n’a nul tourment, la vivante.