La jeunesse exige des comptes d’hoirie, avant l’héritage. Ces adolescents, je voudrais les chérir, mais je me sens infirme devant eux ; je ne sais où placer une affection qu’ils récusent ; c’est déjà difficile d’aimer qui vous aime, mais comment tendre les bras à qui ne veut pas être aimé ? Le seul bien qu’ils attendent de moi, c’est que je m’en aille ; qu’ils me laissent seulement m’éloigner d’eux en prenant ma part de leur peine. Que dire à des orphelins qui sont, en même temps, des parricides ? Ils nous demandent quel sera l’avenir de la jeunesse ; comment leur répondre que l’avenir de la jeunesse, c’est la vieillesse ?

Morand, Discours de réception à l'Académie, 20 mars 1969