Chaque jour les machines gagnent du terrain sur nous ; chaque jour nous leur sommes un peu plus soumis ; chaque jour nous leur offrons encore d’autres hommes en esclavage pour leur service, et chaque jour de plus en plus d’humains consacrent l’énergie de toute une vie à développer la vie mécanique. Le résultat, dont aucun esprit vraiment philosophique ne peut douter un seul instant, n’est qu’une question de temps : les machines seront les vraies maîtresses du monde et de ceux qui l’habitent.



Notre opinion est qu’il faudrait immédiatement leur déclarer une guerre à mort. Qui veut le bien de son espèce devrait détruire toutes les machines de toutes les sortes. Qu’on ne fasse pas d’exception, pas de quartier. Retournons sur le champ à notre condition première. Si l’on nous rétorque que c’est impossible dans l’état actuel des affaires humaines, on nous prouve par là même que le mal est déjà fait, que nous commençons à être leurs esclaves diligents, que nous avons élevé une race d’êtres qu’il n’est plus en notre pourvoir de détruire, et que nous sommes non seulement asservis, mais consentants à notre servitude.

Samuel Butler, Lettre au rédacteur en chef du Christ Church Press (Nouvelle-Zélande , 13 Juin 1863.