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De la mi-Carême

Alors que la « bataille du halal et du cacher » a commencé, Jacques de Guillebon s'étonne que nul grand esprit n’ait encore évoqué le juteux marché du poisson du vendredi qui fait les affaires des chrétiens. Nous sommes accoutumés, nous autres catholiques, à essuyer les sarcasmes de nos interlocuteurs – pour l’occasion généralement réunis en foule – lorsque nous avons l’impudence d’annoncer que nous suivons le Carême.

Incroyable, n’est-ce pas, que des êtres rationnels, d’apparence équilibrée, puissent se livrer à une telle pénitence, non d’ailleurs pour entretenir leur santé ou soigner leur apparence, mais seulement pour l’amour de leur Dieu ?

Si d’aventure nous tentons d’expliquer à une oreille attentivement condescendante quelle peut être la nature de ladite privation, en quoi elle est choisie, variable suivant les fidèles, adaptée à leur vie intérieure et proportionnée à la profondeur de leur foi, qu’en cela elle n’est pas vraiment comparable à celle du ramadan, par exemple, aussitôt nous voilà la cible d’un feu décuplé.

Le même qui ne laissait à l’instant de mo­quer notre foi au nom de sa supposée libération s’assombrit brusquement. Il arrive même qu’il se change en un ardent défenseur de l’islam. Comme si, à bout d’arguments, il ne lui restait plus qu’à jouer une foi contre une autre. Il y a un aveuglement propre à la postmodernité qui tient pour acquis que c’est au même van et au même tamis qu’il faille passer toutes les « religions ».

GOLGOTHA

Cette sophistique n’hésite ja­mais, selon qu’elle veuille prou­ver ceci ou cela, à affirmer contradictoirement un jour que toutes les « religions » sont facteur de guerre, de sang, de violence et d’épouvante ; l’autre jour qu’elles véhiculent toutes autant qu’elles sont le même message d’amour.

Pareillement, lorsqu’il s’agit d’appliquer une loi sur « les signes religieux ostentatoires », va-t-on quérir la si fameuse croix pectorale des chrétiens dont nul n’ignore qu’elle empuantit les cours d’école de sa symbolique d’esclave et que fort nombreux sont les élèves qui arrivent épuisés en cours d’avoir accompli leur quotidien Golgotha en traînant depuis leur maison par-dessus leur cartable un patibulum de cent vingt kilogrammes pour bien affirmer à la face de la terre leur identité religieuse communautarisante.

Aussi suis-je bien étonné qu’alors que la « bataille du halal et du cacher » a commencé, nul grand esprit n’ait encore évoqué le juteux marché du poisson du vendredi qui fait les affaires des chrétiens, cette communauté bien organisée qui défie les lois de la République. Mais cela ne saurait tarder. Une République sûre d’elle-même, si elle voulait continuer de faire manger du steak de la mer à ses chères têtes blondes hebdomadairement, serait bien inspirée de choisir n’importe quel jour sauf ce satané vendredi.

D’ailleurs, prenez-nous le poisson, nous vous l’offrons avec plaisir car au prix où il est, je ne sais quel chrétien désireux de communier aux souffrances du Christ en faisant maigre en con­sommerait encore ce jour-là sans contradiction.

Prenez le poisson, prenez la croix en or et la médaille de baptême, prenez même l’encens, la pourpre, les églises et les cathédrales, nous en bâtirons d’autres là où vous ne savez pas. Car dans ce carême qui va jusqu’à la fin de ce monde, le Christ à côté de nous est pour toujours nu et assoiffé. Et vous ne pouvez rien contre ça.

Jacques de Guillebon

SOURCE : Témoignage Chrétien

TC n° 3484 16 mars 2012

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