Pour Stanley Hauerwas :

L’Évangile est un Évangile politique. Les chrétiens sont engagés en politique, mais c’est la politique du Royaume, qui révèle l’insuffisance de toute politique fondée sur la contrainte et le mensonge et qui trouve la vraie source du pouvoir dans le service plutôt que dans la domination.

Et John Milbank : « Seule une politique liturgique peut désormais nous sauver de la violence du libéralisme. » L’Anglais Olivier O’Donovan, pasteur anglican, lui aussi promoteur de « l’État humble » : « La théologie doit être politique si elle veut être évangélique. »

L’Américain John Howard Yoder, anabaptiste mennonite, auteur de La Politique de Jésus :

La seigneurie du Christ est le centre qui doit guider de manière critique le choix des valeurs, de telle sorte que nous pouvons être appelés a placer en seconde position les valeurs qui sont en contradiction avec Jésus ou même a les rejeter. » « Que celui qui gouverne se comporte comme celui qui sert » (Luc 22, 25-26)

Jésus n’était pas seulement un moraliste dont l’enseignement avait des implications politiques ; il n’était pas d’abord un maître spirituel dont le ministère public aurait malencontreusement été mêlé a la politique ; il n’était pas uniquement un agneau sacrificiel s’apprêtant à être immolé, ni un Dieu-homme dont l’essence divine nous pousse à négliger son humanité. De par sa vocation divine (de par la promesse, l’onction et la messianité), Jésus prophète, prêtre et roi était porteur d’une nouveauté possible dans les rapports humains, sociaux et par conséquents politiques. Son baptême inaugure cet ordre nouveau que les disciples sont appelés à partager et dont la croix représente le point culminant.

Tout comme dans l’Ancien Testament Dieu appelle un peuple, Jésus dans le Nouveau a créé une communauté comme l’humanité n’en a jamais vu de semblable. L’Église n’est pas un simple moyen de salut, elle est déjà le salut.

La nouveauté politique apportée par Dieu dans le monde, c’est une communauté qui sert au lieu de dominer, qui souffre au lieu de faire souffrir et dont la fraternité traverse les appartenances sociales au lieu de les renforcer.

Si, comme chrétiens, nous voulons nous engager politiquement, il est important de nous rappeler que le premier devoir politique des chrétiens est d’être Église. Car l’Église est une entité sociale qui, par sa vie communautaire, rend un témoignage social. « Le sens de l’histoire est déterminé par la croix et non par l’épée, par la souffrance et non par le pouvoir brutal. »

Cf. Denis Sureau, Pour une nouvelle théologie politique (Parole et Silence 2008).